9 juin 2020

gourmandise...















Nous dînâmes dans la cuisine de la grangère, les deux amies assises sur des bancs aux deux côtés de la longue table, et leur hôte entre elles deux sur une escabelle à trois pieds. Quel dîner ! quel souvenir plein de charmes ! Comment, pouvant à si peu de frais goûter des plaisirs si purs et si vrais, vouloir en rechercher d'autres ? Jamais souper des petites maisons de Paris n'approcha de ce repas, je ne dis pas seulement pour la gaieté, pour la douce joie, mais je dis pour la sensualité.

Après le dîner nous fîmes une économie : au lieu de prendre le café qui nous restait du déjeuner, nous le gardâmes pour le goûter avec de la crème et des gâteaux qu'elles avaient apportés ; et pour tenir notre appétit en haleine, nous allâmes dans le verger achever notre dessert avec des cerises. Je montai sur l'arbre, et je leur en jetais des bouquets dont elles me rendaient les noyaux à travers les branches. Une fois mademoiselle Galley, avançant son tablier et reculant la tête, se présentait si bien et je visai si juste, que je lui fis tomber un bouquet dans le sein ; et de rire. Je me disais en moi-même : Que mes lèvres ne sont- elles des cerises ! comme je les leur jetterais ainsi de bon cœur ! La journée se passa de cette sorte à folâtrer avec la plus grande liberté, et toujours avec la plus grande décence. Pas un seul mot équivoque, pas une seule plaisanterie hasardée : et cette décence nous ne nous l'imposions point du tout, elle venait toute seule, nous prenions le ton que nous donnaient nos cœurs. Enfin ma modestie (d'autres diront ma sottise) fut telle, que la plus grande privauté qui m'échappa fut de baiser une seule fois la main de mademoiselle Galley. Il est vrai que la circonstance donnait du prix à cette légère faveur. Nous étions seuls, je respirais avec embarras, elle avait les yeux baissés : ma bouche, au lieu de trouver des paroles, s'avisa de se coller sur sa main, qu'elle retira doucement après qu'elle fut baisée, en me regardant d'un air qui n'était point irrité. Je ne sais ce que j'aurais pu lui dire : son amie entra, et me parut laide en ce moment.

Enfin elles se souvinrent qu'il ne fallait pas attendre la nuit pour rentrer en ville. Il ne nous restait que le temps qu'il fallait pour y arriver de jour, et nous nous hâtâmes de partir en nous distribuant comme nous étions venus. Si j'avais osé, j'aurais transposé cet ordre ; car le regard de mademoiselle Galley m'avait vivement ému le cœur ; mais je n'osai rien dire, et ce n'était pas à elle de le proposer. En marchant nous disions que la journée avait tort de finir ; mais, loin de nous plaindre qu'elle eût été courte, nous trouvâmes que nous avions eu le secret de la faire longue par tous les amusements dont nous avions su la remplir.

Les Confessions - Jean-Jacques Rousseau - L'idylle aux cerises (extrait du livre quatrième)




 File:John Russell - Small Girl Presenting Cherries - WGA20545.jpg



5 juin 2020

seul...?




Seul, fragile et nu
parmi la foule acérée
des orges barbues,
gentil coquelicot
a peur d'être perforé
et tremble sans un mot.






Entre quatre murs
ou en pleine nature,
quand on est seul
on est bien seul.






La vraie solitude, c'est quand tu regardes une fleur merveilleuse et que tu ne peux pas dire : 
tu vois comme elle est belle.
Ça, c'est la vraie solitude. Ne pas pouvoir partager cette beauté avec quelqu'un.
Gino

  

 Chuchotis d'épis
dans un champ de blés
couchés, enivrés
sous le vent conquis

Coquelicot ravi
sur sa tige frêle
ses joues cramoisies
se la joue bien belle!

Claudie 


Un coquelicot vit
plaqué au cœur du vide
dans l'infini vert
Un grand trou béant
git en son centre

Marine Dussarrat


28 mai 2020

contempler...




L'esprit se meut, l'âme s'émeut; l'esprit raisonne, l'âme résonne."
"L'esprit communique, l'âme communie."
François Cheng
Cinq méditations sur la mort. Autrement dit sur la vie.







"Ne jamais cesser de contempler la beauté du monde qui nous entoure, 
même si elle s'exprime de manière éphémère dans un délicat coquelicot." 






 Petit coq fripé
comme un baiser qui s'efface
lumière estivale



Coquelicot tremble au vent
J’écoute Ella Fitzgerald qui chante
Bewitched, bothered and bewildered
La pluie va s'inviter
Tout est suspendu
Tout frissonne
Un nuage passe sans me regarder
Le coquelicot me sourit
Sans le savoir
Mais je sais, moi
Que la vie est là toute
En cet instant...

Ella chante
Le temps s’arrête 
Le coquelicot se balance
 Marine Dussarrat






Coquelicot

Timide en sa jeunesse
la fleur cache son visage
dans ses jupes levées,
qu'elle abaisse fièrement
quand vient le grand âge,
avant de les détacher
au fil du vent.

Tilia






 Chemise rouge passion 
en papier crépon
Et le coeur en gilet noir.

Claude


20 mai 2020

au printemps...



il y a longtemps...






Il revient le printemps sur un air de romance
Un air fleurant l’amour parfumé au jasmin
Pour que la vie soit rose et nos cœurs pleins d’entrain
Sur un air de tango ou de valse de Vienne
Il swingera ici, il rapera là-bas…
Jetant des pas de deux à dérouler sans faute
Les bancs publics auront leur plein d’entrelacés
Les bois ont du muguet à trousse chemiser
Le coucou vous épie méfiez vous, il ricane
Les oiseaux font leurs nids, prévoyants et joyeux
Vous regardez passer des passantes divines
Vous musardez rêvant de muses alanguies
Le Printemps est toujours votre excuse coquine
Après tout il est court et scande le poète
Cours y vite, cours-y vite, un clin d’œil, il a filé…

Marine Dussarrat 







Dans la nature verdoyante, des ceps de vigne
fêtent le retour du printemps, ils s'alignent
faisant une allée royale à ces fleurs divines
si belles dans leur blancheur nuptiale, câlines
et tendres ombellifères à l'allure mutine,
fleurs de carottes sauvages qui illuminent
les sentes, fleurant bon le Printemps qui s'anime!

Claudie 



"...La terre tourne ; il reviendra,
Le printemps, sur son cheval vert...."
Maurice CARÊME

envoyé par Suzanne 




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