Les Soucis du Ciel
Le ciel apprend par coeur les couleurs du matin
Le toit gris l’arbre vert le blé blond le chat noir
Il n’a pas de mémoire il compte sur ses mains
Le toit blond l’arbre gris le blé noir le chat vert
Le ciel bleu est chargé de dire à la nuit noire
comment était le jour tout frais débarbouillé
Mais il perd en chemin ses soucis la mémoire
il rentre à la maison il a tout embrouillé.
Le toit vert l’arbre noir le chat blond le blé gris
Le ciel plie ses draps bleus tentant de retrouver
ce qu’il couvrait le jour d’un grand regard surpris
le monde très précis qu’il croit avoir rêvé
Le toit noir l’arbre blond le chat gris le blé vert
Le ciel n’en finit plus d’imaginer le jour
Il cherche dans la nuit songeant les yeux ouverts
Aux couleurs que le noir évapore toujours.
Claude Roy
Le ciel s'éclaircit des brumes de l'ivresse
des rêves joyeux remplis de tendresse
"Le bon charmeur vaut son pesant d'or à l'époque des récoltes. Je trace
le SIGNE et l'orage éclate,mais je le garde en main, il m'obéit. Je
l'éloigne des champs et des vignes, je le détourne des malheureux qu'il
s'apprête à foudroyer. Quelquefois, par jeu, je l'envoie chez un
collègue qui, à son tour, me relance. On a vu des orages ricocher ainsi
quatre ou cinq fois de charmeur en charmeur."(...)
André Hardellet
La vigne...
change l'eau des nuages en vin....
mais pas en vain...
C'est le levain des poètes....
Claire Fo
La vigne vierge est devenue folle
elle s'élance du haut du fronton
en tendant ses vrilles déroulées
pour chatouiller au passage
le ventre dodu des nuées.
Ses caresses qui les frôlent
font rire tous les petits nuages.
Regardez comme c'est drôle !
ils courent partout dans le ciel
en jouant à saute-mouton
puis ils dansent tous en rond
pour amuser les enfants sages.
Tilia
Va y avoir un grain
gris le ciel vire à l'orage
un grain de raisin
Sur ciel lie de vin
le pampre en fureur s'agrippe
brin de déraison
Miss Yves
orage ô désespoirs
l'orage du ciel vint
mais après le déluge
Dieu en grand juge
après l'eau ,à Noé ,
donna le bon vin
qui rend le cœur gai
orage eau des espoirs
Amichel
Si les nuages n’anticipent…
Si les nuages n’anticipent dans leurs formes
l’histoire des hommes
Si les couleurs du fleuve ne figurent les desseins du
Dieu des Eaux
Si tu ne raccommodes de tes mains d’astromelia les
commissures de mon âme
Si mes amis ne sont une légion d’anges
clandestins Qu’en sera-t-il de moi
R. Gomez Jattin
Traduction Colo
La vigne si sombre et ses découpes aériennes
Ses vrilles en boucle lancées sans cesse
Comme messages de pousse d’un jour après l’autre
Projetant vers le ciel l’ardeur et l’espoir
Des jours meilleurs où fleurs et puis grappes
Viendront couronner le front de la belle saison.
Qu’importe ses noirs dessins et ses volutes
Puisque le ciel diffuse envers et contre tout
Ses sombres apparences, ses trouées de lumière
Et habille somptueusement l’espace inaccessible de liberté.
Maïté Aliénor
L’Essuyeur de tempêtes
L’expression « essuyer une tempête » remonte à la plus haute antiquité.
Si vous désirez qu’une tempête vous fasse de l’usage, entretenez-la convenablement. Et commencez
donc par l’essuyer.
Possesseur d’une bonne tempête d’origine (en France, les meilleures proviennent de Brest et des
environs), assurez-vous les services d’un essuyeur de qualité et ne lésinez pas sur le tarif.
Le procédé relève du bon sens : avant d’essuyer un objet, il convient de le sécher; il en va des tempêtes comme du reste.
L’essuyeur prend sa tempête, l’expose au soleil et attend qu’elle ait perdu son humidité. Il lui faut
parfois,
surtout en hiver, la transporter à des distances considérables pour
trouver le climat idéal - du Pasde Calais aux cirques de Saint-Raphaël.
N’importe, il va son chemin, emmenant sa tempête avec lui et ne cessant
de la surveiller.
Lorsqu’il a enfin découvert le lieu propice, il donne un peu de « mou » à la tempête, afin de la laisser
s’ébrouer
à son aise. Puis, quand elle a atteint un degré de dessiccation
suffisant, il l’étend bien à plat sur le sol (dans un endroit écarté, de
préférence) et se met à l’oeuvre, muni de ses chiffons et de sa brosse à
reluire. Une tempête de violence moyenne exige trois semaines environ
pour être remise en état. Ensuite, il ne reste plus qu’à la libérer.
Mon grand père Beaujolais la Pivoine n’essuyait pas les tempêtes à proprement parler; il ne s’occupait
généralement
que des « grains », des bourrasques modestes, mais il les traitait de
la même manière. Une f ois pourtant, entre Épineuil et Sainte-Agathe
(j’avais sept ou huit ans), il me montra une tempête allongée sur une
prairie et qu’il venait de « terminer ». Elle était tellement propre,
briquée et transparente, que vous auriez juré qu’il n’y avait rien là,
devant vous. J’écarquillais mes yeux d’enfant : Beaujolais me dit « Elle
var’partir d’attaque, maint’nant, quasiment toute neuve ».
Il me parlait avec émotion des jours où les tempêtes rénovées faisaient les quatre cents coups, où ça
grondait
et soufflait partout tandis que lui, dans une cabane de cantonnier,
assistait à la sarabande. Il meparlait aussi des bergères qui venaient
chercher protection auprès de lui, malgré sa barbe de vagabond, ses
mauvaises façons et son goût pour la bouteille. Mais, comment ils
passaient le temps, ensemble, à la faveur d e la tempête « essuyée », je
ne l’ai appris que plus tard, dans des circonstances qui ne se relient
pas directement à cette chronique.
André HARDELLET
L’Essuyeur de tempêtes »
Ed. Plasma, Collection « Feuilles Vives » -épuisé-)
Grimper toujours plus haut
Rechercher la lumière
Soif d'absolu
Naline